Jean Couranjou |
Autour de la demeure :
jardin et propriété
Il faut rappeler ici qu’il s’agit des années 1935-1955,
tout le contexte (voies d’accés et toute la propriété) ayant aujourd’hui disparu
Au Sahel d’Alger, l’antique chemin de la Touche, communément dit Romain qui ici longe la propriété, à gauche.
Depuis El-Biar, il serpente entre les hauts talus de lentisque au parfum sauvage, sous une voûte d’oliviers centenaires où parfois, le soir tombant, hôle la chevêche. Avant d’atteindre Ben-Aknoun, il envoie un rameau vers le sud ; celui-ci se divise, une branche allant vers le cimetière de Sidi-Merzoug, la Madeleine et Hydra, l’autre descendant vers Kadous où, doucement, au creux d’un vallon sous les saules argentés, coule l’oued Romane.
Mais bien avant, il laisse à sa gauche l’accès à l’entrée principale du domaine DJENAN BALDJI marquée par deux piliers blancs, portail grand ouvert.
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Entre ces deux entrées, la principale...
…ouvrant sur cette allée bordée de petits aloès aux hampes à fleurs rouges (ici recouverts par la végétation). Elle contourne à gauche le bois du gymnase limité par une bordure d’agaves au pied de cyprès séculaires ; à droite et séparée d’elle par une épaisse végétation d’arbres, elle surplombe Aznag.
Elle arrive à l’esplanade devant la maison.
A droite, la demeure ; elle présente l’architecture typique de la pleine époque turque (chap. Architecture, datation) : cubes blancs surmontés de terrasses à différents niveaux.
Au fond, construction moins ancienne ; sous une large arcade légèrement outrepassée, surmontée d’un auvent de tuiles vertes et vêtue de bougainvillier****, deux lourds battants travaillés à l’ancienne en rectangles imbriqués, s’ouvrent sur la remise ; celle-ci donne accès au garage, à l’écurie, aux autres communs et à l’escalier conduisant au-dessus : aux dépendances et grenier, et à droite, à la demeure par son entrée de service.
A gauche, en légère surélévation, le «gymnase» marqué aux angles par deux beaux caroubiers, ceint d’une haie de spirée couvert au printemps de la neige de sa floraison et au fond, un bois sauvage jouxtant le Chemin Romain.
Si la partie gauche de la demeure est enfouie sous la pourpre du bougainvillier, ….
…au printemps, la partie droite est parée du bleu de la glycine****.
Tout à droite, l’entrée du jardin sur lequel ouvre la demeure.
Dans son cadre de pierre sculptée marqué à la clef de voûte et aux angles du croissant turc, surmonté du tout aussi classique auvent de tuiles vertes, avec à son pied un pas de tomettes octogonales associées à des petits carrés de faïence verte, une lourde porte est ouverte et quelques marches descendent, menant au jardin…
…sous les pergolas de glycine et de roses, reposant sur de lourds piliers à section octogonale et en pointe au sommet.
Sous cette tonnelle, en été, la nuit tombée, il fait plus frais ; la famille réunie bavarde tandis que sous l’auvent, invariablement la tarente est là, guettant pour les capturer, les insectes attirés par la lumière sur le mur blanc. De temps en temps, passe une légère brise porteuse de parfum de fleurs diverses. Le silence de la nuit sur fond de crissements des insectes, n’est coupé que du coassement du crapaud et du hurlement des chacals se répondant de vallon en vallon tandis qu’au loin, parfois, sur sa flûte rustique, un berger égrène les notes d’une complainte nostalgique. Du haut de l’Atlas, plein sud, le phare de Chréa balaie régulièrement de son rayon l’espace sous la voûte noire constellée.
Sous ces pergolas fleuries, juste au-dessous de la fenêtre aux trois arches de la bibliothèque, sous son auvent de tuiles vertes…
… et dans son cadre de pierre aux trois croissants turcs, décorée de bronzes (gros cabochons, serrures, deux heurtoirs = halqa…) et portant au sommet sa lucarne à grille, la porte d’entrée de la demeure*** (chap. Architecture, datation).
Du portique aux trois arches du bardo, construction proche de la demeure, on voit une partie du jardin. Au milieu de chaque carré, un palmier d’une espèce différente.
A gauche, dans le jardin, après les premières pluies d’automne, çà et là, discrets, fleurissent les cyclamens**** au délicat parfum, souvenir émouvant d’une senteur absente en France.
Axée sur l’aile est de la pergola, juste au-delà des deux lentisques en boule, l’allée aux lavandes percée après l’achat d’Aznag, la traverse, menant ainsi vers la partie sud de la propriété.
Tout de suite sur sa gauche, un chemin bordé d’iris mène à l’olivier. A l’ombre rafraîchissante de ce haut centenaire, l’arbre à palabres en quelque sorte, la famille s’installe les chaudes après-midi d’été ; cet emplacement retenu par un muret de pierres sèches domine la descente, chemin bordé d’oliviers, vers la haie de grenadiers sauvages limitant la propriété à l’est ; sur sa droite, les amandiers et de récents pins parasols ; sur sa gauche, un grand champ, sec l’été, d’où surgissent, dès les premières pluies à la mi-septembre, une foule dense d’Amaryllis**** roses odorants cultivés là et récoltés en masse pour les fleuristes de la capitale.
En été, l’olivier visible du salon (chap. Architecture, datation) est, à proximité de la demeure, l’endroit le plus frais de la propriété, non loin pourtant, de l’autre côté de l’allée sud aux lavandes, du brûlant Aznag aux senteurs de la santoline bordant les allées, tandis que dans les lagerstroemia, stridulent les cigales.
Tout au bout de l’allée aux lavandes, la partie sud de la propriété; à gauche, les logements des ouvriers, enclave mahonnaise fleurant le plâtre et la fumée, et devant elle le puits citerne. Dans cette partie sud de la propriété ; quelques pieds de vigne et quelques arbres fruitiers, ici encore très jeunes avant de devenir de productives essences dont les plaqueminiers.
Au loin la Mitidja ;
au fond, les contreforts de l’Atlas,
se parant en hiver de leur manteau neigeux.
De la terrasse de la demeure***, on voit, la partie est de la propriété avec ses plantations d’arbres fruitiers, limitée par une haie. Au-delà, les vallonnements du Sahel aux senteurs mêlées des cyprès et des pins.
Plus au nord, la vigne dont les deux rangs de délicieux muscat d’Alexandrie.
Côté nord, l’allée de sapindus, jaune d’or en automne, et de lilas, quitte demeure et dépendances pour conduire vers la partie haute de la propriété où s’ouvre le portail de l’entrée supérieure auprès des grands pins parasols.
Elle atteint la noria
Parée de bougainvilliers**** de diverses couleurs, l’antique noria*** étudiée ailleurs (La noria de Djenan' Baldji) se dresse flanquée de ses bassins où coasse la grenouille. Lorsque de sa hauteur, la chaîne à godets remonte l’eau souterraine pour les besoins de la maison, elle égrène sa monotone complainte.
Devant la noria, entre diverses essences dont les pins et le micocoulier, passe une allée bordée de romarin ; sur sa droite, le jardin potager aux divers légumes, herbes parfumées et fleurs.
Avant de redescendre sur la droite entre la double haie de cyprès régulièrement taillée par le maître des lieux, et qui rejoint l’allée longeant les vignes menant au jardin et à la demeure, elle laisse à sa gauche un très vieux puits turc entre deux vénérables cyprès qui lui sont contemporains. Le vieux puits turc de briques aux quatre arches s’ouvre à l’est, en direction de la Mecque.
Les deux cyprès séculaires qui l’encadrent abritaient un tombeau ancien…
…qui fut transporté au proche cimetière musulman de Sidi-Merzoug.
Plus haut, le bois fait entendre le chant du vent dans les aiguilles de ses pins d’Alep répandant avec le lentisque, les senteurs de la garrigue algéroise.
Après la double haie de cyprès taillés, l’allée se dirige vers la demeure. Bordée à sa droite d’arbres sauvages d’essences diverses, elle longe à sa gauche vignes et arbres fruitiers pour mener jusqu’à l’entrée au jardin par son côté nord.
Djenan’ Baldji,
déploiement de façades blanches
sur fond de cyprès sombres,
les deux palmiers repères
te gardaient à notre vue
lors de nos promenades
dans la campagne environnante.